Le quantique des quantiques

Portrait

Inria Starting Faculty Position : à l’écoute des jeunes chercheurs et des partenaires

Portrait de Renaud Vilmart, Inria Starting Faculty Position (ISFP)

Un début de carrière ne se fait pas forcément « piano » ! Avec les ISFP (Inria Starting Faculty Position), les jeunes chercheurs s’installent chez Inria. Et ils y apportent leur expertise, participant à la création d’équipes-projets, à l’image de Renaud Vilmart, spécialiste en informatique quantique.

Jeune chercheur chez Inria, vous avez eu jusque-là un parcours assez classique…

C’est vrai, puisque j’ai intégré une classe préparatoire, puis l’école d’ingénieurs des Mines de Nancy, dans laquelle j’ai choisi un parcours recherche. En troisième année, j’ai opté pour un double diplôme en suivant un master Informatique avec une orientation « Méthodes formelles ». Et j’ai fait mon stage de fin d’études au Loria, le laboratoire lorrain de recherche en informatique et ses applications, dans l’équipe-projet Inria qui s’appelait alors Carte, spécialisée dans l’informatique quantique.

Pourquoi avoir choisi cette spécialité ?

Lors de ma deuxième année d’études aux Mines, nous avons eu deux cours transverses sur l’informatique quantique et j’ai eu envie d’étudier le sujet ! Il est à la croisée des mathématiques, de l’informatique, de la physique et c’est ce qui m’intéressait. J’ai d’ailleurs depuis poursuivi dans ce domaine : après mon stage, j’ai continué en thèse, toujours dans l’équipe-projet Carte et à l’issue de celle-ci, j’ai décroché un postdoc au LRI, le laboratoire de recherche en informatique de l’Université Paris-Saclay et du CNRS, dont Inria était l’un des partenaires privilégiés. L’équipe que j’ai intégrée, VALS (Vérification d’Algorithmes, Langages et Systèmes), dont faisait partie mon superviseur de thèse, Benoît Valiron, était d’ailleurs fortement liée à Inria.

Comment s’est passé votre recrutement ?

Via les liens de mes équipes de recherche avec Inria, j’avais déjà un pied dans l’institut depuis mon stage de fin d’études. En 2020, j’ai donc postulé chez Inria lors du concours commun aux postes de chargé de recherche classe normale (CRCN) et aux Inria Starting Faculty Position (ISFP), qui venaient d’être créés. À l’issue de ce concours, j’ai eu le choix entre les deux postes… j’ai longuement hésité.

Qu’est-ce qui a fait pencher la balance en faveur de l’ISFP ?

Les responsabilités et les missions sont sensiblement les mêmes. Mais l’ISFP engage à enseigner entre 32h et 64h par an et cet aspect modulable du volume de cours me plaisait beaucoup.

Par ailleurs, le statut n’est pas le même : un CRCN est fonctionnaire et dispose donc de la sécurité de l’emploi et d’une progression salariale automatique en fonction de paliers d’ancienneté ; l’ISFP est salarié de la fonction publique, donc avec un poste moins garanti et des évolutions de salaire à négocier lors d’évaluations annuelles. En contrepartie, le salaire à l’embauche est plus intéressant et pour un jeune chercheur, c’est attractif ! Le dispositif étant récent, il reste cependant des points à préciser sur la suite de carrière, vers des postes de directeur de recherche ou de professeur par exemple.

Il y a eu une véritable volonté de créer une équipe-projet Inria, en partenariat avec l’université, autour de l’informatique quantique à Saclay. Le recrutement d’un ISFP a permis de donner de l’élan à cette dynamique.

La composante « enseignement » de votre poste renforce-t-elle les liens avec vos partenaires universitaires ?

Les membres d’Inria sont très proches du corps enseignant car beaucoup en font partie. C’est d’ailleurs souvent par le bouche-à-oreille entre chercheurs que nous sommes sollicités pour mettre en place un cours. J’ai ainsi donné dès ma première année d’ISFP une cinquantaine d’heures d’enseignement en deuxième année de licence à l’Université Paris-Saclay. Et l’année dernière, j’ai ajouté une dizaine d’heures pour un cours en master, que j’ai cocréé avec un collègue d’Inria. Les liens sont donc effectivement forts entre université et équipes-projets !

Et du côté de la recherche, qu’apporte votre ISFP ?

Il y a deux ans, deux chercheurs uniquement travaillaient dans le domaine de l’informatique quantique sur notre campus : Benoît Valiron, du LRI, et Pablo Arrighi, professeur à l’Université. Or le quantique est une thématique de recherche prioritaire du site, commune au Centre Inria de Saclay et à l’Université. Il y a donc eu une véritable volonté de créer une équipe-projet Inria, en partenariat avec l’Université Paris-Saclay, autour de cette thématique et de ces scientifiques. Le recrutement d’un ISFP a permis de donner de l’élan à cette dynamique.

C’est ainsi qu’est née l’équipe-projet QuaCS (Quantum Computation Structures), rattachée au LMF, le Laboratoire Méthodes formelles et à la quintuple tutelle : Université Paris-Saclay, CNRS, ENS Paris-Saclay, Inria et CentraleSupélec. L’agrandissement de l’équipe s’est ensuite poursuivi avec le recrutement de deux autres chercheurs Inria, et bientôt d’un troisième, auquel s’ajoutera une chaire de professeur junior.

Sur quels sujets votre équipe travaille-t-elle aujourd’hui ?

Nous nous intéressons de façon assez fondamentale au fonctionnement de l’ordinateur quantique. Nous développons une approche transverse, qui tente de relier les ressources physiques de l’ordinateur quantique – qu’il s’agisse de photons ou de spins d’électrons par exemple – aux langages de programmation.

Mon sujet de recherche se concentre d’ailleurs sur des langages intermédiaires, qui permettent en quelque sorte de passer de la physique aux mathématiques et à l’informatique. C’est un domaine d’étude qui emprunte beaucoup à l’informatique classique : nous pouvons par exemple adapter les méthodes pour faire de la vérification et s’assurer ainsi que le programme quantique réalise ce qu’il est supposé faire.

Quel style musical associez-vous à votre poste d’ISFP et à vos recherches, et pourquoi ?

Du rock progressif ou du jazz fusion. C’est une musique qui est perpétuellement en mouvement, qui ne tourne pas toujours autour du même refrain. Au départ, on peut ne pas savoir vers où l’on va, mais ensuite, avec un peu de recul, on peut se rendre compte du chemin parcouru, potentiellement de façon très élégante ! Le côté jazz est aussi lié à l’improvisation, qui accepte le risque de l’erreur… pour mieux recommencer !

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